Transmission-reprise Des outils et des partenaires pour alléger le coût du foncier (22-02-2013)
Le portage du foncier permet à un jeune, par l'intermédiaire des Safer, des collectivités territoriales ou d'investisseurs privés, d'acquérir des terres sans altérer ses capacités de financement tout en assurant au cédant la transmission de son bien.
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Acheter des terres reste financièrement difficile pour un nouvel installé. D'autant que les aides à l'installation ou à la transmission (lire l'infographie ci-dessous) ne ciblent pas le foncier. Ou très peu : les prêts MTS-JA, sous certaines conditions, financent l'acquisition de terres lorsqu'elles améliorent la viabilité de l'exploitation.
Le Pidil (programme pour l'installation et le développement des initiatives locales) prend en charge les frais d'intervention de la Safer lors d'un achat réalisé par son intermédiaire, dans le cadre d'une opération de remembrement ou de restructuration.
Des coups de pouce souvent insuffisants quand on sait que le foncier représente jusqu'à 20 % du coût de l'installation et que la moitié des terres qui se libèrent partent à l'agrandissement.
D'autres outils ont été imaginés, parfois sans succès. C'est le cas par exemple du plan crédit-transmission, testé entre 2006 et 2010. Le gain financier n'était au rendez-vous ni pour le cédant, ni pour le repreneur. L'outil avait pourtant été réclamé par la profession pour faciliter les transmissions d'exploitations.
Créé par la loi d'orientation agricole de 2006, il permettait, dans le cadre d'un contrat de vente progressive, de différer jusqu'à la moitié du montant de la transaction entre la huitième et la douzième année suivant la vente. En contrepartie, le cédant bénéficiait d'une réduction d'impôt.
La location-vente pour différer l'achat
Sur le terrain, le portage du foncier se développe par l'entremise des collectivités territoriales, qui, dans certains départements, proposent au repreneur le crédit-bail, un contrat de location avec, à l'échéance, une option d'achat pour une somme tenant compte des versements effectués à titre de loyers.
La Safer aussi pratique la location-vente de foncier, pour faciliter les transmissions en douceur : lorsqu'un jeune agriculteur brigue des terres mises en vente mais n'a pas la capacité financière pour les acheter, elle les acquiert et les lui met à disposition par convention d'occupation précaire et provisoire (COPP) pour une durée de cinq ans, en général.
A la Safer Aquitaine-Atlantique, le contrat a été porté à dix ans « afin d'accompagner au mieux les nouveaux installés », explique Pierre Pouget, son directeur. Le projet d'acquisition progressive du foncier doit être prévu dans le projet d'installation (PDE) et le plan de financement correspondant.
Les frais financiers liés au portage (intérêts d'emprunt) et de gestion du stockage sont supportés par la Région jusqu'à 3 %. « Le département des Pyrénées-Atlantiques a joué l'additionnalité des moyens avec le financement de 1,5 point supplémentaire », souligne-t-il. Le montant maximal de l'achat relevant de ce dispositif est plafonné à 150.000 euros par installation.
« A 3 %, cela fait une subvention de 45.000 euros. Plus que la DJA », note Pierre Pouget. Le jeune agriculteur reverse une redevance annuelle à la Safer, indexée sur le barème départemental des fermages. A l'issue de la COPP, il acquiert le foncier au prix d'achat initial, déduction faite des loyers payés pendant toute la durée de la convention.
« Nous avons des dizaines de dossiers qui ont ainsi pu démarrer, en élevage ou en maraîchage », remarque-t-il. Mais la Safer pose des conditions : pendant la durée de la COPP, le hors-cadre accepte un suivi technico-économique, via l'organisme économique qu'il souhaite, « pour l'appuyer dans sa phase de démarrage ».
Le jeune agriculteur fournit une caution bancaire, à hauteur de 20 % du capital porté. « On l'actionne pour alléger le coût du foncier collectivités territoriales ou d'investisseurs privés, d'acquérir des terres sans altérer ses capacités Safer et collectivités s'associent pour porter le foncier à la place du jeune agriculteur en cas d'impayé ou si, à l'issue de la COPP, le jeune n'achète pas et qu'à la revente, le bien subit une perte », indique Pierre Pouget. La Safer Aquitaine-Atlantique propose un autre coup de pouce : la prise en charge des frais d'acte jusqu'à 3.000 euros, au moment de l'acquisition.
« Pour 45 jeunes aidés en 2012, nous avons versé 120.000 euros sur nos fonds propres », se félicite-t-il.
Des apporteurs en capitaux privés
Outre les partenaires publics, de plus en plus de particuliers, parfois des entreprises privées, investissent dans la terre : un placement à la rentabilité faible, mais sûr. Ces apporteurs en capitaux font le lien entre cédant et repreneur via la Safer ou des agences immobilières spécialisées.
Ils signent en général un bail à long terme au jeune et en contrepartie, bénéficient d'une exonération totale ou partielle d'ISF (impôt sur la fortune). Et quand ils ne peuvent investir seuls, il existe le portage collectif via les GFA (groupements fonciers agricoles) « investisseurs ».
Cet outil consiste à réunir un groupe de partenaires pour acheter la terre et la mettre à la disposition d'un agriculteur. L'investisseur qui souscrit des parts de GFA bénéficie aussi d'un régime fiscal de faveur. De son côté, le fermier peut racheter des parts du groupement chaque année.
Une autre formule a fait ses preuves depuis 2006 : La Foncière-Terre de liens collecte l'épargne auprès des citoyens, associations et entreprises pour acquérir du foncier agricole. Elle loue ensuite les terres, via des baux ruraux avec clauses environnementales, à des agriculteurs bio.
En 2010, 15 millions d'euros ont été collectés auprès de 5.000 actionnaires (2.500 euros en moyenne, actions non rémunérées mais avantage fiscal), pour un total de 1.700 hectares acquis et 65 installations.
Expert : JEAN-BAPTISTE MILLARD, avocat ruraliste (1), administrateur de la Saf
« Offrir les outils du commerce à l'agriculture »
« La location-gérance du fonds agricole, contenant des baux cessibles, est un outil intéressant et alternatif pour accéder au foncier et, le cas échéant, faciliter l'installation. Il n'y a aucune raison, en effet, de priver le secteur agricole d'un tel outil, prévu aux articles L. 144-1 et suivants du code de commerce. La location-gérance évite au locataire d'avoir, dans un premier temps, à financer l'achat du fonds.
Elle peut permettre, dans un second temps, d'envisager son acquisition, grâce aux revenus dégagés par l'activité agricole, lorsqu'elle est assortie d'une promesse de vente de ce fonds.
De même, le crédit-bail immobilier, permettant au preneur qui paie un loyer sur une longue durée (de quinze à trente ans) de devenir propriétaire de la terre au terme du contrat, doit être rendu possible en agriculture (les loyers hors taxes du crédit-bail constituant alors des charges déductibles de l'entreprise).
La mise en place de ces deux outils nécessite toutefois l'intervention du législateur, qui devra prévoir leur articulation avec le statut du fermage. »
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(1) Cabinet Peignot, Garreau, Bauer-Violas.
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